Le syndrome du fauteuil roulant et de la chaise bureau !
Je ne sais pas vous mais moi quand je vais faire mes courses dans un supermarché. J’ai toujours un immense problème : soit ce que je désire acheter est trop dans le rayon soit c’est trop bas. ( J’ai vu quelques solutions dans les magasins à Hong-Kong)
Quand je dois utiliser mon environnement. Ne serait-ce que mon poste de travail informatique, mon bureau est trop haut ma chaise est trop basse trop large trop étroite. Les pieds ne touchent pas le sol, je suis trop droit, trop penché. C’est toujours le même bilan au mieux c’est inconfortable au pire cela crée des douleurs.
Même chose de la vie de tous les jours quand il s’agit de se déplacer. Les pentes accès sont trop raides, les boutons d’ascenseur trop trop bas, les contrastes à l’écran des distributeurs automatiques pas adaptés. C’est un combat perpétuel c’est une fatigue constante pour faire quelque chose qu’une personne valide n’a même pas besoin de réfléchir.
Depuis l’arrivée de la domotique et des objets connectés c’est un peu plus simple. J’ai pu adapter mon environnement à la maison avec des ampoules connectées, des prises connectées avec mais aussi à la place d’utiliser une clé pour la porte d’entrée un digicode ou encore une télécommande de garage avec une porte électrique pour ne plus avoir à dépenser ( plus de pognon ceci dit) encore et encore de l’énergie donc à avoir en stock encore encore et encore de la fatigabilité.
Je n’ai jamais compris pourquoi malgré les 12 millions de personnes handicapées dans le pays, pourquoi les industriels ne réfléchissaient pas plus en termes d’expérience utilisateur. Après tout nous sommes la première minorité de France qui n’est plus tout à fait une minorité.
Tout ce que je décide d’utiliser que ce soit de mon stylo-bille en passant par mes vêtements et en finissant par ma voiture se révèlent inadaptés et nécessitent de devoir l’être. Il faut sans cesse que j’anticipe parfois même que je fasse plusieurs essais pour arriver à trouver le bon outil qui va venir non seulement m’apporter satisfaction mais aussi et surtout du confort.
Je veux prendre un exemple très concret : je mesure un petit peu plus de 1,60 m. J’ai eu besoin très récemment en raison du télétravail d’adapter mon poste de travail à la maison d’un point de vue ergonomique.
En raison de ma taille j’ai eu dans un premier temps besoin d’un bureau avec des pieds relativement bas. Les pieds réglables d’IKEA étant encore trop hauts. Il a fallu jouer de la disqueuse pour raccourcir de 6 bons centimètres ces derniers.
Ensuite il est venu le casse-tête qui m’a bien occupé trois mois pour trouver la bonne chaise de bureau. Après avoir fait le tour des chaises de gamers et celles ergonomiques de différentes marques allant d’un budget de 500 à plusieurs milliers d’euros.
Je fis le tour de l’intégralité des vendeurs de mobilier grand public.
Après avoir vu plus d’une centaine de modèles différents mon choix fut drastiquement réduit. Quelques modèles seulement correspondaient, 2 chez #IKEA ! Me voilà donc parti en direction d’IKEA pour faire des essais. Bien entendus période de télétravail oblige peu de stock disponible.
Sur les deux modèles un seul l’était. Le fameux modèle bien entendu avec son nom tout droit sorti d’une langue imprononçable.1 Petit essai sur place confortable. Il ne reste plus qu’une seule couleur et tant pis si le beige ne va pas avec le reste de la couleur de mon mobilier.
Arrivé à la maison montage de la fameuse chaise de bureau. Premier essai dessus : sensation que cela ne va pas. Je suis gêné je ne suis pas assis comme quand je l’étais dans le magasin quelque chose me chagrine. Après une courte réflexion je me dis qu’en fait la chaise sur laquelle j’étais assis dans le magasin a vu passer des milliers de fessiers et donc forcément l’assise avait travaillé. Je ne touche plus les pieds par terre et pourtant dans le magasin in c’était le cas. Bilan, il a fallu encore réfléchir à la création d’une estrade sur lesquels poser mes pieds pour enfin trouver une zone de confort à peu près acceptable.
Un valide lui aurait posé son C*** sur la chaise et point final.
Alors je l’entends de suite, l’ergonome à qui j’aurais dû poser la question ou même l’ergothérapeute qui aurait pu me conseiller. Ils m’auraient tous les deux que j’aurais dû me tourner vers une chaise ergonomique vendue par un magasin spécialisé ; financée éventuellement par la maison départementale des personnes handicapées. J’aurais trouvé ma chaise à plusieurs milliers d’euros il m’aurait fallu un an pour obtenir le financement j’aurais craqué au bout de six mois parce que j’en ai besoin j’aurais fait un chèque ( ok handi_boomer ! ) , ça m’aurait coûté un bras, un rein ou un emprunt (chez Cofidis à 23 % parce que les banquent ne m’auraient pas prêté et oui je suis handi ! Bref c’est un autre débat). Ça m’aurait pris une quinzaine d’heures de ma vie pour trouver une solution alors qu’un valide 30 minutes de commande et livraison sur Amazon.
N’en parlons pas si j’avais voulu rajouter une lampe de bureau j’en avais au moins jusqu’à la retraite !
C’est Handi adapté donc forcément c’est moche !
Un truc que j’essaye de combattre d’apporter dans les sociétés et dans tout ce que je peux faire autour du handicap c’est que souvent quand on achète quelque chose non seulement c’est cher mais c’est moche.
Un truc qui perdure dans le monde du handicap c’est cette image du médico-social constant. Vous avez remarqué que n’importe quel professionnel que vous consultez a toujours ce code vestimentaire de la blouse blanche ? Et bien c’est la même chose dans le matériel handicap il faut que le matériel handicap est l’apparence de matériel handicap.
À croire à quelque part qu’il y a un designer de la laideur. A un moment donné je suis persuadé que dans une équipe de conceptions il y a un designer qui lève la main et qui dit : « arrêtez tous les gars c’est trop beau il faut qu’on fasse plus moche ».
Moi j’en ai marre d’acheter des trucs qui sont forcément connotés handicap. Je n’achète pas une centrale domotique pour personnes handicapées. Je n’achète pas un vélo pour handicapés. Comme ma boulangerie ne me vend pas une baguette pour handicapés.
Quand on voyage dans les pays anglo-saxons il y a aussi bien des personnes handicapées qui se déplacent en scooter électrique quatre roues que des personnes valides. D’ailleurs ils n’appellent pas ça scooter pour handicapés mais scooter, pas de connotation derrière.
Un autre fait marquant historique et je suis bien placé pour en parler je suis historiquement l’ambassadeur mondial de la discipline. Le tricycle se vélo à trois roues qui est souvent associé soient aux enfants qui ne savent pas faire du vélo soient aux personnes handicapées. Mais ce qu’on oublie c’est qu’au début du XXe siècle c’était un mode de transport extrêmement répandu dans les grandes du monde. Mais depuis les années 40 après avoir abandonné ce mode de transport il a été récupéré par le monde médical puis ensuite complètement déformé dans les mentalités pour l’avoir incorporé dans les esprits comme un outil du médico-social.
Si vous regardez bien mon tricycle que j’ai conçu, que je fabrique et vend ; il n’a rien de médical c’est un vélo avec le troisième groupe et une peinture personnalisable. Si vous le mettez côte à côte avec du matériel de rééducation ça n’a non seulement rien à voir d’un point de vue technique mais ça n’a aussi rien à voir d’un point de vue design. J’ai toujours refusé quand un client vient me voir qu’on le définisse d’abord comme une personne handicapée. Oui il a une problématique à régler de déplacement d’accessibilité etc. etc. mais c’est avant tout un client qui a des goûts, qui aime telle et telle couleur et qui envie d’étaler tel design. Même problématique pour les enfants qui me tiennent autan à coeur; pourquoi un loulou handi n’aurait pas à un tricycle spiderman ou reine des neiges ?!
Si je reviens à ma chaise de bureau évoqué au tout début de cet article c’est la même chose, j’ai non seulement envie qu’elle correspondant mes goûts et ça IKEA le fait très bien mais j’ai surtout envie qu’elle corresponde à mes besoins. Je sais qu’IKEA très récemment a ouvert dans certains magasins des possibilités de personnaliser en impression 3D des boutons de porte de placard sur-mesure. Ils ont même si cela reste très marginal, « mis du handicap » dans leur business.
C’est un peu la conclusion de ce que j’essaie d’apporter dans mon métier de consultant et industriel de mon handicap. Mettre du handicap dans son business. S’ouvrir de nouvelles parts de marché. J’ai longtemps réfléchi à l’optique de créer une société extrêmement spécialisée sur cette question-là en internalisant l’intégralité de notre schéma de production et de diffusion mais je me dis que je suis bien plus utile en tant que consultant extérieur pour permettre à des sociétés qui font déjà très bien leur travail d’en faire un peu plus.
Je vois et lasse trop souvent des sociétés faire de l’inclusion avec tout le marketing que cela représente et je m’oppose fermement à cette handi Washing chronique commence à s’installer dans les esprits. Il n’est jamais bon de faire de la ségrégation marketing. La segmentation n’a jamais rien amené voir même elle a plutôt détruit le livre ensemble.
Mon travail c’est de conseiller et d’apporter cette vision qui doit sortir du handicap. C’est de recentrer les esprits et les compétences pour que tout le monde puisse avoir accès à n’importe quel produit et technologies.
Prochain coup je vous parle de mes cuissards d’entrainement vélo que je ne trouve que chez Décathlon !